Essais pour une critique émancipatrice de la modernité capitaliste et des Lumières bourgeoises
Traduit de l’allemand par Wolfgang Kukulies
Depuis le 11 septembre 2001, c’est avec une arrogance jamais atteinte jusqu’ici que les idéologues de l’économie de marché et de la démocratie invoquent leur enracinement dans la grande philosophie des Lumières. Oubliée la « dialectique de la raison » d’Adorno et Horkheimer, oubliée la critique de l’eurocentrisme : il n’est pas jusqu’à certaines fractions de la gauche qui ne s’accrochent à une prétendue promesse de bonheur bourgeoise, alors même que la mondialisation du capital ravage la planète.
Robert Kurz qui s’est fait connaître pour ses analyses critiques du capitalisme et de son histoire (La Substance du capital, L’Effondrement de la modernisation), s’attaque ici aux « valeurs occidentales » à contre-courant du mainstream intellectuel dominant et au-delà de la critique passée des Lumières. Dans ces essais théoriques polémiques et fondateurs, on voit s’ébaucher une nouvelle critique radicale de la forme-sujet moderne (déterminée de manière masculine) et ce non pas pour rendre hommage à un romantisme réactionnaire mais afin de montrer que les Lumières et les contre-Lumières bourgeoises ne sont que les deux côtés de la même médaille. L’objectif visé est une « antimodernité émancipatrice » qui refuserait les fausses alternatives se situant toutes sur le terrain du système patriarcal producteur de marchandises.
Robert Kurz (1943-2012) est l’un des principaux théoriciens de la « critique de la valeur-dissociation », un courant international élaborant une critique radicale du capitalisme fondée sur une relecture novatrice de Marx, à contre-courant du marxisme traditionnel. Critiquer le système marchand en termes d’une simple redistribution plus juste des richesses, voilà qui pour Kurz, constitue une approche qui, loin d’être une solution du problème, fait partie de celui-ci. Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est une critique catégorielle du capitalisme qui s’attaque à ses éléments structuraux : le travail, la marchandise, l’argent, l’Etat.
Parmi ses ouvrages traduits en français : Vies et mort du capitalisme (Lignes, 2011), Lire Marx (Les Balustres, 2012), Impérialisme d’exclusion et état d’exception (Divergences, 2018), La substance du capital (L’Echappée, 2019), L’industrie culturelle au XXIe siècle. De l’actualité du concept d’Adorno et Horkheimer (Crise & Critique, 2020), L’Effondrement de la modernisation. De l’écroulement du socialisme de caserne à la crise du marché mondial (Crise & Critique, 2021).